sabdam

Solo Exhibitions

"INNER SILENCE”

à la Galerie BIEN. Bordeaux

Casque tu dis?

Bordeaux

DUMP OF PHYSICAL MEMORY

Tinbox, Bordeaux

Sorry, you are dangerous

France, Marseille

Nos troubles

Sète

1999

Villa Arson, Nice
whiteCross

SABDAM ou Alice KELLER
Née en 1971 à Toulon. Vit à Bordeaux

Les instruments sont là, sur la platine. La musique est en boîte. Des gobelets vides emportés et mixés par le vent et la musique. Cela pourrait être un autoportrait lors d’un moment de perception aiguë du monde. Le corps s’engage afin de filmer la vitesse, l’espace et le son de motos. Il se munit de prothèses, une construction d’appareillage insensé, telle, par exemple, une perche de caméra imaginée afin de saisir sans trucage le vol en boucle des mouettes. La vidéo peut également s’engouffrer dans la foule des gares lorsque retentissent les signaux sonores indiquant la fermeture imminente des portes. Une tension se crée, souffle, énergie. Sabdam “boxe” avec les images, leur flux, leurs sons en soignant le rythme du montage qu’elle ne cesse de tenir sur le fil de la mémoire jusqu’à ce qu’advienne l’amnésie. Sabdam se réapproprie la musique selon un cheminement propre au processus de création musicale. Le nom d’un groupe fictif apparaît comme il se doit sur la batterie et les amplis : “UNDO/ADD” (enlever/ajouter). Ce terme correspond à un effet que les musiciens utilisent sur la table de mixage. L’artiste a choisi le vocabulaire approprié à la façon dont les compositeurs de musique électronique jonglent avec le rock, en réutilisant, par exemple, des sons punk de la fin des années soixante-dix. En énonçant de façon emblématique ses repères, Sabdam évoque un moment fort, celui où l’artiste utilise l’énergie de la transe. Alors s’ouvre un monde de rythmes, de sons et d’images qui transpirent, jusqu’à transmettre cette dépense violente.
De quel temps s’agit-il ici ? Les divers éléments nous immergent dans un monde où la platine disque est une scène recyclée mais également une sorte de boîte à musique où tournent inexorablement des instruments. Les câbles sortent du mur (“alone”, 2000), suspendant une guitare ainsi qu’un ampli. Le bras de la platine disque sort du mur et sert de support à la boîte à images( “présonorisation back head”/ tête de lecture, 2002). Les sons sortent, les images affluent. Une projection vidéo, une vidéo, “street corner” (2002) couvre une paroi jusqu’à ouvrir l’espace d’exposition sur un autre espace, un espace extérieur qui nous vient en pleine face, les images et les sons partent en vrille et en trilles, battement toujours recommencé, tension qui monte jusqu’à se cogner la tête contre les murs.

=> lien vers l’article du CRAC

Matières électroniques

Sorry, you are dangerous n’est ni une œuvre de vidéaste, ni une œuvre de plasticienne. Puisant dans le registre de la musique électronique, l’exposition travaille le son et l’image sans jamais les dissocier. Il faut comprendre que ni le son ni l’image ne sont illustratifs l’un de l’autre. Comme l’affirme Bastien Gallet dans son enquête sur les musiques électroniques (Le boucher du Prince Wen-Houei), les musiques électroniques ne sont pas des signes à interpréter mais des surfaces à décrire. Le son électronique n’est rien en lui-même, c’est une matière plastique, ici, l’image aussi. Sabdam se définit comme sculpteur.

Espace, consistance

Son et image plantent une architecture et l’habitent. Ils organisent un espace de circulation, sont la circulation même, jouent de la vitesse, du mouvement, du déplacement. Des danseurs de hip- hop se produiront en direct dans cette texture, dans l’image, dans le son, entre l’image et le son. La danse hip-hop comme la musique électronique est performative. Le geste y prime la subs- tance, l’acte y devance l’expression.

Distorsion

Le montage des images commence par l’addition et la répétition de séquences-samples, à l’infini. Cette surabondance d’images est retravaillée (remix) avec la technique du cut hip-hop. Le montage se fait à l’oreille, c’est le choix du son et non de l’image qui est prépondérant. Pour les vidéos des caméras embarquées, des hip-hopeurs ont dansé dans l’espace urbain avec caméras à la jambe et au bras, dans des lieux repérés par Sabdam. La gestuelle répétitive du danseur de hip- hop produit une image déjà samplée.

Signature, anonymat

Sabdam est un pseudonyme qui signe moins une œuvre qu’il n’estampille une démarche, celle de la rencontre de différents milieux avec celui de l’art, et de différentes personnes. En se qualifiant ainsi, l’artiste rassemble plusieurs identités en même temps qu’elle brouille la sienne.

“C’est un nom androgyne qui brouille les pistes de mon origine, et fait partie d’une fiction et d’un jeu, tout comme Alice Keller”. Dans le milieu de la musique électronique comme celui de la littérature, on se rebaptise. “Changer d’identité c’est bouger des frontières”. Pour Sabdam enfin, titrer les œuvres les fait exister et met poétiquement le public sur la piste…

Bénédicte Chevallier

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Votre travail porte autant sur la musique que sur la vidéo. Comment jouez-vous sur ces deux registres ?

J’ai toujours été intéressée par la musique de film, le rapport entre l’image et le son. 

Je ne fais pas du Vjing. C’est plus un travail sur les bandes son.

Je me sers des bruits de fond de mes vidéos en les transformant en petites nappes sonores qui se fondent dans mes morceaux. C’est plus l’esprit du ciné-concert que du vjing.

Quels sont les matériaux, les samples sonores et visuels utilisés ?

Je filme depuis 15 ans. Je n’ai plus de caméra depuis un moment. Le matériel s’use. Quand j’accroche des caméras sur des danseurs de hip hop pour filmer la ville à travers leurs mouvements, comme je l’ai fait il y a quelques années à Marseille, c’est normal que ça s’abîme.

Alors, je me débrouille avec ce que j’ai déjà. Je récupère des petites captations de lieux que j’ai filmés à travers la France et ailleurs sur des vieilles bandes, comme des shots tournés sur un téléphone portable. C’est fait à l’arrache. J’utilise même ces séquences où la caméra est allumée alors que tu la croyais éteinte. Je peux monter un film d’une demi-heure avec 30 secondes d’images. 

Je capte aussi beaucoup de sons qui m’entourent au quotidien, comme une machine à café qui coule, les bruits d’un chantier en bas de chez moi, des voix dans les journaux télévisés, ou celles de gens qui discutent dans le tram. Je fais ces prises de son avec ce que j’ai sous la main à un moment donné ! J’utilise aussi des samples de batteries et d’ instrus que je pioche à droite à gauche et que je déforme.

Collaborez-vous avec d’autres artistes bordelais ?

On n’est pas beaucoup à faire ce genre de musique à Bordeaux. Je me sens proche de Plim Plim. Il y a une scène à Bordeaux, mais comparés à ceux qui font du rock’n’roll, on  n’est pas nombreux à lier le côté expérimental à l’électro. Je compte sur les doigts de la main les personnes qui font ça : Neurosystem, Présence Capitale, MA Asso. Il y a quelques années, on a fait des soirées dans des appartements avec le collectif Neurosystem dont je fais partie. C’était beaucoup plus convivial que de jouer dans des salles souvent trop grandes. Je travaille depuis plusieurs années avec Baby Kruger sur le projet Pattern Out Law ». On se fait des sessions quand on se voit, mais c’est rare parce qu’elle vit maintenant en Belgique.

Vous venez de l’art contemporain. Comment êtes-vous devenue Alice Keller ?

J’ai fait de la sculpture sonore et des dispositifs pour des expos pendant 15 ans. J’ai aussi pas mal vadrouillé dans des résidences d’artistes au fin fond du trou du cul de la France. L’art contemporain demande de gros dispositifs, de l’argent et de l’espace. C’est dur de gérer ça toute seule. J’avais envie de créer un autre projet, ça a été A lice Keller. Je ne suis pas du tout musicienne à la base. Alors, je me suis intéressée à la musique concrète et j’ai passé beaucoup de temps à apprendre sur des logiciels, à me faire ma propre cuisine. Je choisis mes morceaux et mes visuels en fonction de la scène et du public. J’aime m’adapter aux propositions qu’on me fait. C’est une prise de risque à chaque fois.  Je trouve ça plus vivant. À l’heure actuelle, en tant qu’artiste, je trouve qu’exposer une œuvre dans un musée, c’est la faire mourir. Je ne devrais pas te dire ça, mais soyons punk ! Je préfère faire vivre mon projet en live. Au départ, je ne m’étais d’ailleurs jamais dit que j’allais faire de la scène. 

Je pensais faire de la musique de film ou de studio. Puis on m’a proposé de monter sur scène et j’ai accepté, même si je suis quelqu’un de timide.

Vous ne vous appelez pas Alice Keller dans le civil. Pourquoi ce nom de scène ?

Cette question m’énerve. C’est juste un pseudo, comme en littérature, qu’on utilise pour faire exister des fictions. C’est la signature du travail que je fais. J’ai trouvé ce nom pour faire vivre mon projet. C’est un clin d’œil à mon arrière-grand-mère qui s’appelait Keller. C’est aussi une référence à Art Keller. C’est l’un des pseudos de l’artiste Paul Devautour, qui insère des textes situationnistes dans des peintures de personnages de BD. Je suis une héritière des fictions de ce personnage fictif.

[propos recueillis par Annabelle Georgen]
Alice Keller, concert visuel, mardi 17 mars, 21h, Utopia.
E.Motion, circuit électronique multimédia, du vendredi 27 février au samedi 28 mars.

Renseignements www.neurosystem.org

Alice Keller sortira en juin son premier album 9 titres sur le label allemand Umbruch Recordings

www.myspace.com/alicekeller
www.myspace.com/umbruch
http://issuu.com/spiritbordeaux/docs/spirit48light/908

Elle sculpte les sons et les images comme des matières concrètes et s’amuse à brouiller les pistes en les enchevêtrant dans des plages atmosphériques noise et indus. L’énigmatique artiste bordelaise Alice Keller est en concert visuel

mardi 17 mars, au cinéma Utopia. Une des étapes phares du circuit électronique multimédia E.Motion.